any last advice ? stay alive.if we burn, you burn with us.
MEMORIES IN THE CLOUDS ✳
N’oublie pas Mélanie. Il y a le cœur, et la raison du cœur. Les deux sont liés par un seul et même fil conducteur : l’espérance. Tu ne sais plus combien de fois ces mots ont percutés le flot de tes vestiges antérieurs. Ces mêmes souvenirs qui s’entrechoquent entre petite enfance et instant présent. Le vent d’automne venait s’échouer avec véhémence dans ta chevelure d’un noir de jais – une couleur que tu avais hérité de ta mère bien loin de la tignasse en bataille couleur de miel de ton frère ainé – te rappelant que très bientôt les jours de grands froids laisseraient place à un renouveau. Celui de la renaissance du printemps. Du haut de tes douze années, tu te demandes encore ce que te réserveras l’avenir, ce que le destin à programmer pour toi et puis tu sais que rien ne se joue à une décision, que tout prend forme selon nos choix dans l’instinct. Ce raisonnement tu le perçois à chaque fois que tu vois la détermination de ta mère à l’œuvre dans son travail, à chaque fois que ton père rentre de son service, qu’il délaisse sa fonction de pacificateur pour celui de chef de famille. Cette même famille ayant participé aux jours sombres dans l’ombre. De simples histoires que te racontent encore ton grand-père du haut de son vieil âge. D’une poigne de main ferme, tu sens que l’on tire ta tresse en arrière mais guère d’un geste de méchanceté c’est même tout le contraire. Tu sais d’ailleurs qu’il n’y a qu’une personne capable de le faire, Roman. Ce dernier s’installe à coté de toi sur la vieille souche d’un arbre dont quelques champignons avaient élus domicile. Une vision que suffisait à balayer – durant quelques minutes - tout ce que tu pouvais devant toi, le fourmillement des habitants en plein centre du marché du district. «
Tu rêves encore aux corneilles Mei. ». Ce n’était pas une question, mais plutôt une constatation desservi à te taquiner comme il savait si bien le faire pour détendre l’atmosphère, pour t’égarer loin des sentiers qui avaient une tendance non négligeable à te rendre un brin trop réaliste. Tu hoches lentement la tête en portant ton attention sur la silhouette de votre père, portant dans ses bras la dernière de votre fratrie. Elle était encore bien jeune mais transpirait encore l’innocence et l’insouciance, tu désirais préserver cela tout comme Roman tentait de le faire avec toi. Vous vous protégiez les uns les autres, cela allait toujours ainsi le tout autour de valeur commune qui demeuraient encore implicite à l’œil nu – comme humaine d’ailleurs –. «
Demain à lieu le jour de la Moisson, Roman. Et cette fois, je crois que cela sera différent … ». Murmures-tu d’un calme tacite, les prunelles toujours rivées sur l’identité de votre paternel. Il était en train de négocier quelques prises de gibiers qu’il avait pu chasser en compagnie de ton frère, une routine habituelle. Tes paroles étaient le résultat de ton instinct et non pas parce que demain tu allais participer pour la première fois à la Moisson. A de nombreuses reprises tu avais assistée à cette dernière, toujours avec la même pensée à l’esprit : celle d’épargner ton frère. Une pensée égoïste en surface alors que la vérité aurait été d’épargner tous les enfants et adolescents présent sur la place publique de chaque district. Tu n’as pas besoin de regarder ton grand-frère pour savoir qu’il te lance une expression calme et sérieuse à la fois. Il blâme ta faculté à ressentir les choses ainsi que ton tempérament trop cartésien qui te poussait à être une adolescente conséquente dans manière de réfléchir. «
Tout sera comme les autres années, mais ne te range jamais derrière un fait parce que tu le penses vain. Jamais rien n’est vain, Mei. Tout va bien se passer. ». Te confie-t-il tout en enroulant son bras autour de tes frêles épaules. Tu avais beau avoir douze ans, tu n’en restais pas moins maigre d’apparence mais ton esprit avait jusque-là toujours fait la différence. Tu te laisses aller contre son épaule, sa tête reposant sur la tienne comme lorsque tu ne trouvais pas le sommeil et qu’il te jouait un air d’harmonica. «
Je ne comprends pas tout ce que tu me dis … ». Répliques-tu d’un air ronchon, la mine boudeuse prenant naissance à la commissure de tes lèvres. Il te donne un léger coup de coude pour t’embêter, son sourire étant une source contagieuse. Votre père vous appelle au loin, vos regards se fixant sur sa personne comme un seul homme. Il lance une pomme à chacun en cherchant à comprendre au travers de la complicité de vous unie ce qui te rend si bougon. Un rire commun vous rattache, un bruit sonore que tu n’entendras plus jamais, du moins plus autrefois. Le lendemain suivant, Roman avait été tiré au sort pour la prochaine édition des Jeux de la Faim.
N’oublie pas Mélanie. Il y a le cœur, et la raison du cœur. Les deux sont liés par un seul et même fil conducteur : l’espérance. Ce sont les dernières paroles qu’il a prononcé lorsque tu as été lui dire au revoir. Et elles continuent de se répéter de manière redondante au fond de ta mémoire.
SHINE A LIGHT ON ME ✳ L’aigle sauvage plane dans le ciel comme un présage, un prédateur attendant sa proie ? Un messager aux mauvais augures ? Si d’ordinaire on acculé les ombres aux corbeaux, la présence d’un aigle dans les parages n’étaient jamais un signe de chance. Le cri strident au son presque impérial vient captiver l’attention de quelques passants – y compris le tient – se rendant à la Plaque. Derechef, tu lèves la tête en direction du ciel dont les nuages striés de gris et épais n’ont rien de chaleureux à partager. Le rapace forme de grands cercles de manière récurrente avant de disparaitre dans le lointain ne formant plus qu’un petit point noir sur l’horizon. La main droite en visière, tu continues de l’observer avec silence tes lèvres se pressant l’une contre l’autre ne formant plus qu’une ligne mince. Les légendes que te racontait ton grand-père sur les animaux de la forêt et des montagnes te reviennent alors en mémoire. Ce conte où l’esprit d’un être courageux reprend vie au travers d’une réincarnation animalière, où l’aigle abrite la conscience d’un seul homme, la sagesse humaine unie à l’instinct primaire qu’est la nature. Oui, peut-être Roman était-il lui aussi un accompagnateur des montagnes, prêt à servir une autre vie qui n’était plus la sienne. Une autre vie où il vous s’observait en silence, en catimini, il veille sur vous. A cette pensée – bien enfantine – tu esquisses un parfait sourire discret au coin de ta bouche avant de reprendre ton chemin pour te rendre à la Plaque. Quotidiennement ce chemin était un trajet routinier où les échanges de services ou de nourriture faisaient tourner le district. En tant que pacificateur au sein du douze, ton père servait néanmoins la sécurité autour de la place publique et en autre pour organiser la sécurité du maire. Il préférait éviter le centre du marché et ce depuis la mort de Roman qui avait éveillé quelques soupçons sous des actions de rébellion. Dans l’ombre et de sous expresse réserve, ta famille était bien loin de respecter les règles l’exemple du braconnage en étant certainement un parfait exemple – ou bien comme venir en aide à quelques rebelles dont vous n’aviez plus jamais eu de nouvelles –. Cependant, il vous fallait masquer les apparences ce qui n’était jamais sans risques. Ta besace en cuir en travers de ton épaule, tu entends les bavardages des éternels habitués de cette zone, l’effervescence de la Plaque commence à gagner du terrain et les négociations de troc vont bons trains, s’élevant tel un bourdonnement d’abeille en plein été. Alors que tu tentes de te frayer un chemin parmi cette foule active, tu entends la voix tonitruante et catégorique d’un pacificateur retentir dans l’enceinte intérieure des lieux. «
Je me fiche bien de savoir qui tu es, le respect des règles est pareille pour toi le monde y compris pour cette gamine ! ». Tonne le pacificateur en désignant d’un bref signe de tête la dite gamine avoisinant certainement la dizaine, un âge où il y a encore quelques années ta sœur y ressemblait. Les représentants de l’ordre du district e sont – plus ou moins – connus et tu sais que le visage de ce personnage grimé et balafré en travers du visage ne peut qu’appartenir à Wilson. Un collègue que ton père ne porte guère dans ton estime, c’est même plutôt le contraire. La gamine à une griffure sur la joue, rien de bien grave en soi. Néanmoins, le jeune homme qui la devance de quelques pas est quant à lui bien amoché. Son avant-bras est orné d’une coupure nécessitant des points de sutures, tu pouvais le juger à une première vue d’œil. «
Vous n’avez aucunement le droit de la traiter ainsi. ». Il n’y avait aucune agressivité dans l’intonation de l’étranger et s’il en éprouvait de l’animosité ou encore de la colère il n’en montra strictement rien. Par bien des ressemblances il te fait penser à ton frère ainé, son calme est olympien, sa témérité est maitrisée. Wilson sort son arme qu’il pointe en direction du point frontal du l’inconnu. L’expression de ce dernier n’a pas bougé d’un millimètre, il est stoïquement posé comme s’il savait que ce n’était pas son heure. La foule qui les encercle les couve d’un regard suspendu et pesant à la fois. La gamine se colle un peu plus contre son protecteur, par peur peut être ou bien simplement parce qu’elle se sent en sécurité avec lui ? Tu n’aurais su le dire, en tout cas tu étais impressionnée par le tempérament raisonnable et fluide du jeune homme à la tignasse légèrement en bataille.
« Je traite ces gens comme bon me semble surtout lorsqu’un étranger perturbe les coutumes de ce … ». Des pas résonnent, les habitants du district s’écartent lorsque ton père s’avance en direction du point de rassemblement. Sa silhouette est bien différente de celle qu’il adopte à la maison, mais tu sais pourquoi et puis tu en as l’habitude. Tu tournes ton attention en sa direction en lui suivant d’une œillade sans bruit mais avec écoute. «
En effet Wilson, c’est le pacificateur issue du quatre dont je t’ai parlé il y a quelques jours. Laisse-lui donc un peu de temps pour comprendre les bonnes vieilles habitudes de ce milieu. ». Rétorque ton paternel d’un rire goguenard et patibulaire tout à la fois. Un registre qu’il n’employait que dans fonction aux services du Capitole, une couverture qui lui permettait de préserver sa famille et d’œuvrer pour le bien être de chacun. Une couverture qu’il avait endossé pour tenter d’apaiser les craintes et les tensions qui subsistaient au sein du douze, bien qu’il souhaitait en son for intérieur un changement pour tout Panem. Ce gouvernement, cette vie lui avait déjà pris une sœur et son fils, deux pertes qu’il ne voulait plus subir au même titre que les autres familles. Wilson se renfrogne en marmonnant quelques jurons dans sa barbe, lançant un regard sinistre au jeune venu du quatre. Il était donc originaire du district de la pêche. Bien que tu apprécies la forêt, la mer devait être belle à voir. Un songe éphémère qui s’efface rapidement lorsque ton père te remarque et t’interpelle. «
Mei. ». Tu t’avances alors pour les rejoindre, les prunelles du nouveau pacificateur te scrutant avec une intensité ténue. «
Tu veux bien t’occuper de Jaime ? ». Te dit-il de sa voix éternellement confiante et paternelle à la fois avant d’échanger une poignée de main avec le dénommé Jaime. Ton père s’en retourne à ses affaires, les pupilles du brun te semblent alors se moquer de toi tout en te portant un intérêt soudain que tu ne comprenais pas. Tu t’abaisses à la hauteur de la gamine, en effleurant avec précaution et douceur la rougeur de sa joue. «
Ne t’inquiète pas, d’ici demain matin tu retrouveras ta joue intacte. Mais pour cela tu vas devoir me promettre d’y appliquer de l’eau bien froide et ensuite de masser ta joue avec cette crème. ». Dis-tu amicalement à la fillette tout en lui donnant un petit flacon plat contenant de la crème cicatrisantes. Tu l’usais souvent pour soigner les blessures dites superficielles et il était encore assez simple de s’en procurer – du moins tu l’espérais –. La gamine te sourit avant d’hocher la tête et de remercier celui qui lui avait évité le pire. Tu te redresses sur tes deux jambes avant de te retourner vers ton interlocuteur. Tu fronces légèrement les sourcils pour le toiser d’un air prudent. «
Alors il parait selon ton père que tu fais des miracles ? ». Tu arques un sourcil, pensant qu’il veut faire de l’humour. «
Pas réellement non, si j’en faisais le douze ne serait pas dans un état de pauvreté avancé et les jeux n’existeraient même pas. ». Ton timbre est pondéré, déterminée. Jaime esquisse un sourire que tu ne prends pas la peine de remarquer car ton attention est focalisé sur la blessure présente sur son avant-bras. «
Je parlais en terme de médecine, Mélanie. ». Si au début il te paraissait joueur, il a en ce même instant délaissé son masque de malice pour déposer l’empreinte d’un sérieux impassible, tu ne pouvais en douter. «
Sans doute. ». Réponds-tu à son attention tout en te retournant pour te rendre devant un étalage d’épices et d’herbes, Jaime sur tes talons. Tu saisis un bouquet d’herbes à mélange de menthe et de safran et tu payes tes achats à la vieille dame qui te salue d’un sourire chaleureux et bienveillant. Il te saisit par le poignet pour croiser ton regard dont la couleur est aussi noire que celle de tes cheveux. «
Toi et moi on va devoir communiquer tu sais. ». Tu le regarde avec silence, te contentant d’hausser les épaules. «
Je m’occupe de ta blessure, cela sera déjà pas mal. ». D’un geste catégorique tu te dégages de sa prise, avant de reprendre ta marche sachant très bien qu’il te suit de quelques pas.