Furtif et discret comme une ombre, Noah est aux abois. Il a l’habitude maintenant de passer la barrière électrifiée mais l’expédition reste tout de même un challenge. Certes, il a un pourcentage de succès assez impressionnant. Celui de la défaite frôle la barre du zéro mais on n’est jamais trop prudent. Dure leçon apprise jour après jour. C’est souvent de l’autre côté de la barrière qu’il s’est fait avoir mais pas par des pacificateurs, par des animaux sauvages. Et eux, ils ne font pas de cadeaux. Les pacificateurs sont encore humains et peuvent encore laisser entrevoir une once d’humanité. La seule personne qui lui vient à l’esprit est Skylar : une pacificatrice corrompue mais qui est son ami depuis tellement longtemps qu’il ne compte plus les années. A travers elle, il a appris à ne pas dénigrer systématiquement les pacificateurs.
Il se cale dans un coin de mur et observe avec attention la rue qu’il doit traverser. Le grillage est tout près. Tout est silencieux. Encore une coupure d’électricité dans le district douze, comme d’habitude. Noah s’y porterait même pas attention si ces coupures ne lui permettaient pas de passer à travers la barrière électrifiée.
Il s’avance dans la petite rue, sa liberté devant lui, lorsqu’il entend un bruit derrière lui. Ténu mais reconnaissable entre tous : il est suivi. Son cœur rate un battement et il pense à s’enfuir mais il se ferait rattraper aussitôt, il le sait. Il reste immobile en l’entendant approcher. Une femme probablement. Son pas est léger sur le sol humide et son souffle ténu. Quand sa voix s’élève, il n’y a plus de doute quant au sexe de l’intéressée. Elle a probablement une arme dans sa main si l’on en croit le cliquetis caractéristique du métal. Une pacificatrice. Génial.
Noah se retourne lentement, un sourire narquois sur le visage. Son petit plaisir personnel est de les provoquer, tous autant qu’ils sont. Il penche la tête sur le côté en évaluant sa position, l’arme et la pacificatrice. Une jolie pacificatrice mais elle reste une ennemie malheureusement. Malheureusement pour elle. Il ne va pas la laisser lui tirer dessus mais quelques sarcasmes font toujours plaisir.
« Oh… Et dire que ce n’est pas la première fois que je « passe outre ce grillage ». Vous étiez où les fois d’avant Mademoiselle ? »
Il mime des guillemets avec ses mains et prend un sourire enjôleur. Provocation pure et dure qui pourrait lui coûter cher mais il s’en fiche. Lentement, il se rapproche jusqu’à faire en sorte d’être juste en face d’elle. Il est un peu plus grand mais elle est armée.
« Si vous lâchiez votre arme ? Vous risquez de vous faire plus de mal à vous qu’à moi … Je ne pense pas être du plus bel effet en tant que cadavre et puis, soyons sérieux, aucun témoin ici. On vous soupçonnera de m’avoir abattu pour le plaisir. »
Il reprend son souffle comme pour faire durer le suspense et reprend d’une voix suave :
« Oh, vos supérieurs seront contents. Mais les habitants… Attendez vous à une réaction assez froide. »
Son ton est ironique et sarcastique. Provocateur. Une sorte de défi se lit dans ses yeux tandis qu’il ne quitte pas les prunelles de celle qui lui fait face. Il se met en danger et il aime ça. L’adrénaline parcoure ses veines à la vitesse d’un cheval au galop et bientôt il sent une de ses euphorisante bouffée remonter jusqu’à son cœur.