Lorsqu’ils étaient enfants, Scylla était la meilleure amie de Luther. Elle le connaissait mieux que personne, passait tout son temps libre à ses côtés. Ensemble, ils s’évadaient régulièrement du quotidien, disparaissant pendant des heures pour trainer en dehors du district, au-delà des grilles. Ils refaisaient le monde, s’imaginaient grandir dans un district plus aisé. Scylla fut le meilleur soutien de Luther quand tour à tour disparurent son père, son grand-père et son frère. Elle était l’une des rares à ne pas le dévisager, persuadée que contrairement à ce qui se disait, il ne portait pas malheur. Mais ses convictions furent mises à mal quand son nom fut tiré au sort pour la douzième édition des jeux. Luther fut dévasté par la nouvelle, croyant comme beaucoup que Scylla n’était pas de taille à lutter contre les autres tribus plus entrainés. Pourtant, la jeune fille revint victorieuse, mais à jamais traumatisée. La jeune fille souriante et dynamique avait laissé place à une femme sinistre et terrifiée par la moindre chose. Scylla n’était plus que l’ombre d’elle-même, et Luther ne savait guère comment lui venir en aide. Il espérait qu’avec le temps, les choses rentrent dans l’ordre, mais la jeune femme s’enfonça dans l’alcool et la dépression, allant jusqu’à se montrer méfiante envers Luther lui-même. Aujourd’hui, Luther, qui devient chaque jour plus hostile à Panem, continue d’espérer qu’il n’a pas perdu Scylla pour de bon. Il voudrait qu’elle cesse d’avoir peur du Capitole. Il voudrait lui redonner l’envie de vivre, un simple sourire lui suffirait. Il n’a pas tout à fait oublié l’ancienne Scylla, celle qui a égayé les seize premières années de son existence. A sa manière, un peu maladroite et brutale, il voudrait lui faire prendre conscience d’une chose : même si elle s’est persuadée du contraire, elle reste une battante, comme lui, et aurait mille raisons de prendre sa revanche sur le Capitole.


Ils sont frères, unis par les liens du sang et par une même histoire tragique. Luther a élevé sa fratrie comme il a pu, et a fait tout son possible pour que les siens n’aient pas à faire les mêmes sacrifices que lui. Bien qu’Enzo soit plus jeune de deux ans, Luther a toujours refusé qu’il souscrive des tesserae, qu’il travaille à la mine après l’école… Il persistait à dire que c’était son rôle d’ainé. Enfant, Enzo n’y trouvait rien à redire. Mais dès l’adolescence, des tensions s’installèrent entre les deux frères. Enzo ne supportait pas d’être traité comme un enfant, estimant qu’il avait lui aussi son rôle à jouer auprès de leurs plus jeunes frères et sœurs. Désormais adultes et débarrassés de cette responsabilité, les relations entre les frères se sont assagies. Mais tous les deux dotés d’un fort caractère, ils se disputent encore très souvent. Les raisons ? Enzo reproche à Luther de vivre dans le passé, incapable d’oublier Scylla, détruite par sa victoire aux jeux. Enzo connait Scylla depuis toujours, mais sait qu’elle entraine son frère vers le fond. Quant à Luther, il est persuadé que le manque de prudence de son frère envers les pacificateurs le fera tuer, comme leur grand-père avant lui. Luther a déjà perdu trop de monde pour accepter de voir son frère mourir comme un imbécile. Luther et Enzo s’aiment, mais ne se le diront qu’entre deux insultes, incapables de se dire les choses franchement.